8 exemplaires numérotés de 1 à 8 et 4 exemplaires d’artiste identifiés de A/D à D/D. 'Le peintre passe d'un rectangle à l'autre, celui qui dessine ou peint. Le rectangle...
8 exemplaires numérotés de 1 à 8 et 4 exemplaires d’artiste identifiés de A/D à D/D. "Le peintre passe d'un rectangle à l'autre, celui qui dessine ou peint. Le rectangle de papier, le rectangle de toile, le rectangle de cuivre à graver, le rectangle de la pierre lithographique: rectangles, tant et plus. Déjà, la table de travail en est un. Et le mur. Être invité à quelque transposition lyonnaise sur un rectangle de soie, me disais-je, ne changera rien à l'affaire. Mais l'inattendu, la nouveauté, la surprise m'apparurent quand je fus branché sur la technique de la soie même, ce courant de haute tradition. Ah, ils ont plus d'un tour dans leur sac à délices, ces artisans, ils en connaissent un brin. Au premier essai au sabre (à chaque métier son jargon), revoir mes lignes à l'encre de Chine en termes de velours : la soie accroche la lumière, la retient, la renvoie quand elle veut; elle transforme la couleur mais dans une brillance naturelle qui lui appartient, ici support sur toute la surface. L'avenir de cette expérience dépend de la bonne fortune de croisements multiples entre deux délires (l'improvisation et la tradition), comme aussi de l'audace de s'éloigner de la voie timorée, bridée, parfois lugubre, qu'impose à tort le trop hiérarchique respect du modèle. Quel modèle? L'original, le vrai, c'est le résultat."
P.Alechinsky
Il y a trois ans, Hilaire Colcombet - dont la famille porte pavillon haut de la soie lyonnaise depuis 1763 - me fit visiter son usine et ses merveilleuses archives. Et comme j'admirais les miracles qui naissaient sous les mains de ces artisans, il me révéla qu' il existait moins de 10 ouvrières - véritables artistes de la main - capables d'assurer la coupe "velours au sabre", technique qui exige une sûreté prodigieuse, car avec une fine lame qui porte le nom de "sabre", l'ouvrière repère fil à fil pour couper chaque fibre afin que subsistent quelques millimètres de tiges qui lui donneront le relief souhaité. Le risque est si grand que l'apprentissage nécessite plusieurs années et que certaines ouvrières n'y parviennent jamais. La longue chaîne du Moyen Âge et qui depuis des siècles se perpétue risquait d'être rompue. Peut-on, me dit-il, laisser périr un tel capital de "mains" et de valeur sans enregistrer ce savoir-faire parfait ? N'est-il pas possible de le préserver ?" Et il me proposa d'inviter quelques-uns des plus grands peintres contemporains à choisir la soie comme support de création d'une œuvre originale. "Je souhaiterais, me dit-il, non seulement perfectionner ainsi, et aussi loin qu’il se pourra, ce médium millénaire, et lui permettre d'atteindre l'expression la plus complète dans son tissage, dans son relief, sa finesse, sa transparence, mais servir la modernité souvent géniale de l'invention plastique d'aujourd'hui et ·offrir de nouvelles formules de création et de matériaux aux artistes du temps." Il existait de grands précurseurs : Raoul Dufy et Sonia Delaunay qui, on le sait, ont été les instigateurs qui ont montré jusqu'à quel point de connivence il était possible d'établir un mariage heureux entre "artiste du faire" et génie de l'intuition des formes et des couleurs. Pouvait-on aller plus loin ? Car il y avait une différence fondamentale entre les impressions sur soie réalisées d'après les esquisses de Sonia Delaunay et Raoul Dufy et la démarche nouvelle les artistes devaient intervenir à chaque étape de la création du tissu et le choix des techniques pour adapter le matériau à l'inspiration. C'est alors que nous avons proposé à sept artistes parmi les plus importants : Agam, Alechinsky, Delvaux, Dewasne, Hartung, Hundertwasser, Matta de participer à cette aventure de l'art. Je savais que ce serait pour eux à la fois une découverte et une occasion de dépassement, car le handicap est toujours positif pour un véritable plasticien. La peinture et la soie ont une longue tradition orientale, mais notre Occident, depuis Venise et l'invention de la toile, ignore le subtil rayonnement de la soie, substance vivante qui exige une attention - on peut dire un amour - particulier. Et il faut en étudier le magnétisme ou comme les refus, le rendu, et les variations, la transparence comme la gourmandise colorée. Durant deux ans, cette passionnante collaboration a mobilisé les derniers grands artisans lyonnais, graveurs, tisseurs, ennoblisseurs. Comme dans les disciplines de la tapisserie ou de la sculpture, l'édition originale qui a été réalisée, comprend 8 exemplaires de chacune des œuvres réalisées suivant les règles qui définissent l'originalité non seulement devant la loi, mais en permettant une réelle collaboration des créateurs, et afin que soit assuré le principe de l'authenticité. Les formes, les couleurs, les reliefs ont été définis par les artistes en dialogue avec le matériau et les artisans, dont véritablement la soie est la nervure spirituelle de la personnalité. C'est là le miracle de chacune de ces œuvres. Demain, ce "quelque chose unique" issu des siècles artisanaux sera peut-être menacé de disparaître, mais, à jamais, sera enregistrée, par des œuvres immuables, cette fraternité entre les artistes et les artisans. Le pari a été tenu.
Fuji Television Gallery. Osaka, Tokyo, Kyoto. 1983
Maison de la Culture. Montréal. 1983
Sedunion. Barcelona. 1984
Musée d’Impression sur Etoffe. Mulhouse. 1984
Château de Vascoeuil, Centre Régional d’Art et de Culture. 1985
Harrod’s. « Say Silk ». London. 1985
Publications
L' Art en Soie: Agam, Alechinsky, Delvaux, Dewasne, Hartung, Hundertwasser, Matta. Ed. Bucol. 1981 "L'Art en Soie" Catalogue de l'exposition du Musée des Arts Décoratifs, Paris - Janvier 1982